C'est quoi une organisation humaine du travail?


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mardi 07 février 2017

Il se trouve que ma mère va avoir 87 ans. Elle vivait chez elle jusqu'à une chute et une fracture du poignet en juin 2016. Si son poignet s'est vite remis, elle a décidé d'aller en maison de retraite. Le changement semble avoir été plus facile pour elle que pour nous, ses enfants. Il faut croire que l'on s'occupe bien d'elle dans cette maison de retraite.

Pourtant, en début 2017, les conditions se dégradent: on ne fait plus autant attention à elle, dirait-on. Plusieurs fois, on retrouve ma mère avec des chaussons "fermés" au lieu de ses chaussons ouverts au niveau des orteils. Or les chaussons classiques lui font mal, au point de provoquer des plaies à ses orteils. Et puis, il y a quelques jours, ma mère alerte toute la famille: sa bague de fiançailles a disparu! 

Ma sœur se rend immédiatement sur place, demande à voir la surveillante et lui fait part de tous les dysfonctionnements constatés récemment. La surveillante écoute attentivement, prend des notes, présente ses excuses et indique qu'elle prend au sérieux ces problèmes. Elle explique qu'une grande partie du personnel a changé au début de l'année: l'établissement reçoit du nouveau personnel en formation.

Quelques minutes plus tard, une aide-soignante se présente à la porte de la chambre de ma mère. Ma sœur ne la connait pas: elle fait partie du nouveau personnel. "Votre bague a été retrouvée et placée dans le coffre de l'établissement en attendant de savoir à qui elle appartenait. La voici, Madame." Grand soulagement de ma mère en voyant la bague que mon père lui avait offert il y a 67 ans! Et l'aide-soignante, s'adressant à ma sœur: "les chaussons, c'est moi. Je ne savais pas que ça faisait mal. C'est juste qu'ils étaient plus jolis. Je suis désolée. Dorénavant, je lui mettrai les chaussons orthopédiques. Et je m'assure que mes collègues reçoivent la même instruction."

L'organisation humaine du travail, c'est bien autre chose qu'un ensemble d'attitudes individuelles bienveillantes. C'est un choix managérial. Pour qu'une personne reconnaisse son erreur, comme cette aide-soignante, il faut qu'elle ait confiance dans le système, c'est-à-dire qu'elle soit certaine que cette erreur ne sera pas utilisée contre elle à l'avenir. De la même manière, la surveillante n'a pas cherché à défendre son personnel. Ma mère a cette chance d'être dans une maison de retraite où elle se plait. Les pensionnaires et leur famille sont au centre de l'organisation du travail et le ménage passe après. C'est un choix de gestion.